mardi 4 mars 2025

« Rien foutre » (P. Carles) ou imposer à l’Etat sa vision/gestion du travail (B. Friot) ?

 [Ce billet illustre la définition du "travail" donnée par Bernard Friot par la critique de deux documentaires de Pierre Carles, définition qui s'éloigne à la fois du "rejet du travail" (très répandu dans le monde libertaire) et de la défense de la "valeur travail" (qui enthousiasme la droite comme la fausse gauche à la Ruffin ou Roussel)]

Deux documentaires du très bon réalisateur Pierre Carles, Attention danger travail (2003) et Volem rien foutre al païs (2007), traitent de la question du « travail ». Dans le premier, on nous montre les aspects les plus détestables du monde de l’entreprise (recrutement avec propagande patronale, management qui pousse les « collaborateurs » à être le plus productif possible, travail à la chaîne épuisant et démoralisant, etc.) alternant avec des entretiens avec des personnes heureuses d’être au chômage, qui ont renoncé à l’idée de trouver un emploi et ont malgré cela « une vie sociale très riche » (comme l’indique un intervenant). Ce film renforce donc notre détestation du monde du « travail » et notre désir de le fuir. Justement, le second documentaire nous propose des alternatives possibles. On suit des personnes ayant rompu avec le marché du travail, qui peuvent vivre du RMI ou de leur production (élevage ou agriculture). Alors que les forces politiques réactionnaires défendent la « valeur travail », il est tentant de la rejeter, comme le font certains protagonistes du film. Ce qui les amène à une réflexion sur la nature de leurs activités et la distinction entre « travail » et « activité » qui est en réalité un travail non reconnu socialement (c’est-à-dire par l’État)[1], comme l’a été (et l’est encore en partie) le travail domestique assigné généralement aux femmes. Le rejet du « travail » (qui est en réalité le rejet de l’« emploi » dans une entreprise capitaliste) est ambigu : il est à la fois une conquête sur la souveraineté de son travail (on est maître de ce que l'on fait et souhaite produire), mais également une concession faite à la représentation dominante de sa propre activité, qui n’est pas revendiquée ici comme étant un véritable travail. Et ce dernier point ne peut changer qu’à condition de mener une bataille contre l’État (capitaliste) qui décide de façon arbitraire de ce qui relève du « travail » ou pas. Autrement dit, la conquête d’une souveraineté sur son travail doit être menée à un niveau national, afin de changer les représentations[2] et la Loi.

 


 

jeudi 20 février 2025

Une critique sympa de L'inhumanité par "Tata culture" sur Insta


 

Le serial killer fascine et inquiète. Il est la rareté et l’horreur.
 
On veut comprendre son « profil ». Par là, on entend sa psychologie. Parfois, on recherche du côté de la génétique, espérant capter l’essence du « tueur-né ». On s’intéresse à sa mère (de temps en temps un peu à son père). À ses fréquentations, à ses lectures, à ses œuvres fétiches, aux jeux vidéos qu’il affectionne, aux bizarreries qu’il collectionne… La singularité du monstre est là pour dire qu’il ne montre rien d’autre que l’inhumanité. L’absence à la civilisation. La désertion de l’espèce.
 
Et si l’homme asocial avait en réalité tout d’une créature socialement fabriquée? Ou plutôt économiquement façonnée ?
 
La corrélation entre violences économiques et serial killing est insuffisamment inspectée, selon le sociologue Laurent Denave. Pourtant il y a de quoi s’y intéresser quand on observe la trajectoire économico-sociale des serial killers dans le pays qui en produit le plus, les Etats-Unis.