mercredi 17 avril 2024

« Donner le pouvoir aux pauvres » (Chouard) ou sortir de la pauvreté ?

 

A la question « Sommes-nous en démocratie ? » (posée par un journaliste du Média), l’économiste Olivier Berruyer réagit de la façon suivante : « C’est une question qui est amusante, parce qu’on ne l’entend jamais. C’est un débat que tu n’auras jamais dans C dans l’air ou dans une chaîne d’info ; cela fait partie des points, si tu dis ça dans un média mainstream, tu n’es plus réinvité (je le sais, c’est ce qui m’est arrivé, comme à d’autres). Il y a un champ du possible, on peut critiquer Macron, mais il y a des choses sur lesquelles on ne peut pas parler, on ne peut pas parler de la légitimité et surtout on ne pas parler de la démocratie. Est-ce qu’on est en démocratie ? Non ! On n’est évidemment pas en démocratie parce que, qu’est-ce que la démocratie ? On peut dire que c’est le gouvernement du peuple (ça on y est), par le peuple (ça on n’y est pas), pour le peuple (on y est encore moins). On est dans un système plutôt oligarchique, avec un gouvernement du peuple par les élites, au bénéfice des oligarques »[1]. Il pense que beaucoup de gens sont aujourd’hui en colère parce que l’on va appliquer des politiques que majoritairement on refuse. Comment est-ce possible ? « Parce qu’on a des institutions qui ne sont pas démocratiques et ne sont même pas représentatives. On est allé au bout d’un système de dépossession du peuple, de son pouvoir »[2]. Il cite ensuite le texte de l’Abbé Sieyès sur la démocratie (du 7 septembre 1789) où il est clairement dit que les « Français sont trop bêtes pour prendre des décisions eux-mêmes », donc il ne faut pas une véritable démocratie, mais une « démocratie représentative », ce sont les élites, les « représentants du peuple », qui doivent prendre les décisions. Dans la bouche des dominants, « démocratie » se confond donc simplement avec « élections ». Cette critique rejoint finalement la définition réaliste de la « démocratie » donnée par la sociologue Annie Collovald : « Le peuple lorsqu’il vote ne supprime pas les élites et ne prend pas leur place : il ne fait que départager les élites entre elles, choisir une élite à la place d’une autre. On peut dire alors que ce qui est démocratique en démocratie, c’est la compétition politique et non le mode de gouvernement. La démocratie, ce n’est pas quand le peuple exerce le pouvoir, mais quand la lutte pour y accéder est ouverte et concurrentielle (absence de parti unique, multiplicité des candidatures, diversité des visions du monde offerte, sélection diversifiée socialement des compétiteurs…) »[3].

Mais qu’est-ce qu’une véritable démocratie ou « démocratie directe » ? L’anthropologue David Graeber définit les « pratiques démocratiques » comme des « procédures de décision égalitaires »[4], que l’on observe d’ailleurs à toutes les époques, partout dans le monde. Cela suppose en principe que les décisions soient prises une fois arrivés à un consensus et sans être soumis à un instrument de coercition comme l’État : « L’absence du pouvoir d’État signifie l’absence de tout mécanisme systématique de coercition pour mettre en application les décisions »[5]. Or, en Occident, depuis le 18e siècle on semble vouloir concilier « démocratie » et pouvoir d’État, ce qui est une contradiction dans les termes. On est donc loin de l’idéal démocratique de Graeber à la naissance de la République en France et on s’en éloigne toujours plus depuis quelques décennies[6]. D’ailleurs, rien n’est fait pour éduquer les citoyens aux pratiques démocratiques véritables (pas de transmission de dispositions et compétences adéquates à la pratique démocratique, c’est-à-dire à la participation à la prise de décisions) : si l’on excepte les formes rares d’éducation libertaire, l’éducation familiale et scolaire est autoritaire, l’organisation du travail dans le privé ou le public n’est en rien démocratique (le rapport de subordination est même inscrit dans le contrat de travail) et aucun loisir ne favorise non plus la pratique démocratique (le sport par exemple renforce surtout les dispositions autoritaires et l’amour de la compétition). De surcroît, on n’accorde pas assez de temps libre aux citoyens pour participer à la vie politique et éviter (ou limiter) la professionnalisation de la politique qui est également une dépossession du pouvoir d’agir du reste de la population. A ce sujet, Pierre Bourdieu espérait que l’on puisse tous un jour s’occuper de nos affaires (politiques) : « Je pense que la politique serait tout autre chose et l’action politique tout autrement efficace si chacun était convaincu qu’il lui appartient de prendre en main ses affaires politiques, que personne n’est plus compétent que lui-même, s’agissant de gérer ses propres intérêts. Il faudrait pour cela que la concurrence dont le champ politique est le lieu contraigne les hommes politiques à autoriser et à favoriser des formes d’organisation et d’expression (comité d’entreprise, assemblées de quartier, assemblées communales et non conseils municipaux) qui permettent aux citoyens, à tous les citoyens, de contribuer réellement à la production du discours et de l’action politique »[7]. Il ajoutait ceci : « Une des vertus de ces irresponsables – dont je suis – est de faire apparaître un présupposé tacite de l’ordre politique, à savoir que les profanes en sont exclus. (…) seuls les politiques peuvent parler politique. Seuls les politiques ont compétence (c’est un mot très important, à la fois technique et juridique) pour parler de politique. La politique leur appartient. Voilà une proposition tacite qui est inscrite dans l’existence du champ politique »[8].

 

 

Pour que les citoyens puissent participer aux prises de décisions politiques ou, tout au moins, se battre pour rendre nos institutions un peu plus démocratiques, des militants nous invitent à nous saisir de cet outil politique très particulier qu’est le RIC[9]. Son plus célèbre défenseur est sans aucun doute Etienne Chouard (professeur d’économie et de droit à la retraite, qui se présente comme anarchiste). Il défend la nécessité de se doter de nouvelles institutions et nouvelles lois. Dans son livre Notre cause commune, Chouard écrit qu’il cherche « la cause des causes », autrement dit la « cause commune » aux problèmes d’injustice sociale qui traversent notre société actuelle ; pour lui, il s’agit du texte de notre Constitution qui nous dépossède de notre puissance politique. Il écrit ceci : « nous autres, le "peuple", avons besoin de représentants, au-dessus de nous, ayant un pouvoir pour produire et appliquer un droit écrit, qui pacifie notre société, en empêchant la domination arbitraire des plus forts »[10]. Pour contrecarrer le caractère autoritaire de nos institutions politiques, il défend le tirage au sort : « l’élection est par nature aristocratique, donc oligarchique, (…) la seule procédure qui soit démocratique, c’est le tirage au sort, assorti de mille contrôles des gens qui sont désignés par le sort. (…) le tirage au sort a toujours donné le pouvoir aux citoyens les plus pauvres, les "99 %" (regardez les deux siècles de démocratie à Athènes, il n’y a pas d’exceptions) »[11]. Chouard aime se référer à l’exemple de la démocratie athénienne : « Nous avons deux laboratoires politiques pour vérifier sur le terrain que la pratique confirme bien ce que permet de prévoir la théorie : 200 ans de tirage au sort (quotidien) à Athènes (aux Ve et IVe siècles av. J.-C.) ont permis aux citoyens pauvres (aujourd’hui, on dirait les 99 %) de gouverner pendant la période ; alors que, au contraire, 200 ans d’"élections-parmi-les-candidats" (depuis 1789) ont permis aux citoyens riches (aujourd’hui, on dirait les 1 %) de gouverner pendant toute la période. Donc, en théorie comme en pratique, l’élection donne le pouvoir aux riches (aux 1 %), et le tirage au sort donne le pouvoir aux pauvres (aux 99 %) »[12]. On passera sur le fait que les pratiques démocratiques étaient réservées à un petit nombre (dont les esclaves et les femmes étaient exclus). On retiendra simplement l’idée que « les pauvres avaient le pouvoir » : même si cette vision des choses est historiquement avérée (j’ai quelques doutes), selon les termes mêmes de Chouard, les pauvres ont gagné en pouvoir de décision, mais ils sont restés… pauvres[13] ! Est-ce un véritable progrès de demander aux dominés de collaborer à la gestion d’une société économiquement inégalitaire ?

Actuellement, il y a 18 pays où l’on applique une forme de RIC, comme l’Uruguay, la Suisse, la moitié des États aux USA, etc. Selon Clara Egger, qui a défendu cette mesure lors des présidentielles de 2022, cela a des « effets spectaculaires en termes de qualité de la vie politique[14] ». Pourtant, ces pays sont-ils plus économiquement égalitaires ? Certainement pas ! Un progrès démocratique ne garantit absolument pas un progrès en termes de conditions matérielles d’existence. Si les pauvres adhèrent à l’ordre établi, ils ne le mettront pas nécessairement en cause si on leur donne le pouvoir de le faire. En raison de leur socialisation (renforcée par la propagande médiatique quotidienne), les dominés ne défendent pas nécessairement leurs intérêts (on le voit que trop bien à chaque élection).

 

Peut-on être de gauche et démocrate ?

 

Dans un entretien datant d’avril 2022[15], le philosophe de gauche  Geoffroy de Lagasnerie défend que la « démocratie » n'est pas nécessairement un système politique que l'on devrait défendre (contrairement aux mouvements politiques classiques qui souhaitent « plus de démocratie »), et affirme qu'un seul individu peut avoir raison « seul contre tous »[16]. Le philosophe préfère rompre avec ce régime (y compris avec l'idéal qu'il représente) mais ne dit pas quel type de régime il voudrait fonder[17]. On pourrait lui répondre que, justement, la démocratie n'existe pas actuellement et qu'il s'agit d'un but vers lequel on doit tendre (appliquer réellement les principes qui fondent une « démocratie »). Et on pourrait également se méfier d’une posture aristocratique qui s’accorde avec les origines sociales du philosophe, qui pourrait bien être symptomatique de l’effondrement en cours de notre démocratie représentative (ou tout au moins de la croyance au bien-fondé de ce régime). Mais ce serait ignorer un véritable problème qu’il s’agit d’affronter si l’on veut vraiment rendre le monde plus juste. On retrouve le problème de la domination symbolique et l’adhésion par une grande partie de la population à l’idéologie dominante (conforme aux intérêts des dominants) : tant que cette domination s’imposera au plus grand nombre, on se désolera de constater que les pauvres se désintéressent de la politique ou votent contre leurs intérêts (sujet de débat qui revient régulièrement à gauche). De plus, on ne peut pas nier qu’historiquement une grande partie des mesures les plus révolutionnaires prises depuis 1789 ont été imposées de façon autoritaire grâce à la prise du pouvoir d’État par une « avant-garde éclairée » qui n’était sans doute pas représentative des positions de l’ensemble de la population. Et il faut bien reconnaître qu’aujourd’hui encore certains mouvements luttent pour imposer de nouveaux droits sans être toujours soutenus par la majorité de la population. Doivent-ils renoncer à leur combat pour autant ? Les démocrates les plus conséquents aujourd’hui sont sans doute les libertaires qui parviennent à appliquer leurs idées dans de petites communautés composées de membres qui partagent les mêmes idéaux et la volonté de les appliquer concrètement ici et maintenant. Pour universaliser ces pratiques réservées jusqu’à présent à une petite élite de militants, on doit sans doute compter sur l’éducation (libertaire) et la propagande (convaincre les gens du bien-fondé de ces propositions). Et pour ce faire, il serait bon de s’appuyer sur une organisation de masse (à la fois démocratique et populaire) dont ce serait précisément le rôle de convaincre une partie toujours plus large de la population de reprendre le contrôle de nos vies en prenant le pouvoir partout où cela est nécessaire (institutions politiques, travail, école, etc.) et d’en faire bon usage (l’utiliser pour fonder une société plus juste et vivable pour tous).

 

On comprend pourquoi les militants de gauche, dont la réduction des inégalités économiques est l’objectif principal, peuvent se méfier des idées de Chouard. Au nom d’un combat pour l’institution d’une prise de décision égalitaire, on appelle à l’unité des forces politiques de gauche comme de droite : « Ce qui empêche le peuple de gagner, ce sont les divisions, c’est la zizanie sur des sujets législatifs (par essence conflictuels : c’est normal et légitime de se disputer sur des sujets législatifs), sur des sujets sur lesquels nous sommes habitués à discuter alors que nous n’avons pourtant strictement aucun pouvoir de décision : ce n’est pas nous qui décidons, ce sont les élus. Nous avons l’habitude de nous disputer pour rien car de toute façon, ce n’est pas nous qui décidons. L’idée centrale des "gilets jaunes", c’est : pas de zizanie, restons unis »[18]. Mais Chouard ne fait pas rêver les militants progressistes[19] en leur promettant la gestion égalitaire des injustices sociales en matière de conditions matérielles d’existence ! Par ailleurs, il inverse l’ordre des priorités militantes : l’égalité de décision passe ici avant l’égalité de condition, la lutte pour la Constitution avant la lutte des classes[20]. Or, on ne voit pas comment les riches et les puissants se laisseraient déposséder de leur pouvoir sans résistance ou sans garantie que cette démocratisation de nos institutions n’aurait aucun effet sur leurs conditions privilégiées. On sait qu’il ne suffit pas d’écrire de belles lois pour combattre l’injustice. Les dominants ont les moyens de contourner les lois qui pourraient limiter leurs intérêts (comme le disait très justement le sociologue Luc Boltanski, « les dominants imposent des règles qu’ils ne respectent pas eux-mêmes »). Prenons l’exemple des violences (ou maltraitances) sexuelles. A cet égard, les pauvres font l’objet d’une attention spécifique des services de l’État, par la police, mais aussi les services sociaux et médico-sociaux qui constatent les mauvais traitements au sein de la famille[21]. On retrouve ce type de violences dans les classes supérieures, mais elles échappent à la Justice grâce à « de puissants mécanismes de non-judiciarisation, voire de contre-judiciarisation, permettant d’éviter l’opprobre qu’entraîne la révélation d’affaires de criminalité sexuelle. On pense à des règlements financiers à l’amiable ou encore à des effets de notabilité conduisant à renoncer à la dénonciation afin d’étouffer les affaires »[22]. On pourrait parler aussi de l’évasion fiscale ou du non respect du droit du travail par les riches (notamment lorsqu’ils emploient des domestiques[23]). Tant qu’on laissera à des individus les moyens de contourner la Loi, ils les utiliseront… En conséquence, ce n’est pas parce que sur le papier on aura une jolie « démocratie représentative », que cela fonctionnera réellement de cette façon et que l’on construira un monde plus juste. Seul un rapport de force favorable aux dominés permettra d’obtenir des conditions de vie acceptables[24].

 [Ce petit texte devait figurer en annexe du chapitre 6 ("Mythes populistes [ou la destruction de la démocratie]") de mon livre Combattre la domination. De la démystification à l'émancipation (en libre téléchargement sur z-library)]



[1] « En France, la grande colère qui vient », Le média, 30 avril 2022 (en ligne : www.youtube.com/watch?v=3aGwXNc7cbw).

[2] Idem.

[3] Annie Collovald, Le “populisme du FN” un dangereux contresens, Croquant, 2004, p. 104.

[4] David Graeber, La démocratie aux marges, Flammarion, 2018 [2014], p. 22.

[5] Ibid., p. 87.

[6] Actuellement, les députés n’ont presque plus aucun pouvoir, c’est le président qui applique son programme sans tenir compte de l’Assemblée nationale (qui est devenue la « chambre d’enregistrement » des décisions prises par le gouvernement). Sans parler du fait que nombre de décisions importantes sont désormais prises au niveau européen (par le Conseil ou la BCE).

[7] Pierre Bourdieu, Interventions (1961-2001), Agone, 2002p. 102.

[8] Ibid., p. 163.

[9] Chouard explique que le RIC ne nous fait pas basculer dans une démocratie directe où l’on voterait directement les lois ; c’est seulement dans le cadre d’une démocratie représentative que l’on a besoin de cet outil afin d’améliorer ce cadre (meilleur contrôle de nos représentants) ; il y a un grand nombre de lois qui ne nous intéressent pas ou sont trop compliquées, on veut juste pouvoir participer à l’élaboration (ou la modification) des lois qui nous semblent les plus importantes. Il s’agit donc d’une amélioration de la démocratie représentative et non d’un basculement dans une démocratie directe.

[10] Étienne Chouard, Notre cause commune. Instituer nous-mêmes la puissance politique qui nous manque, Max Milo, 2019, p. 18.

[11] Ibid., p. 21.

[12] Ibid., p. 45.

[13] Il va de soi qu’il faudrait se référer aux travaux des spécialistes de la Grèce ancienne pour dire des choses plus précises et justes.

[15]    Geoffroy de Lagasnerie, « Se révolter face aux crimes du capitalisme », Blast, 2 avril 2022 (en ligne : www.youtube.com/watch?v=rvU_DPUeD5I).

[16] Il ajoute que « c'est la démocratie qui est en train de tuer Assange ».

[17] Dans d’autres interviews il se dit prêt à occuper le poste de ministre de l’Intérieur si Mélenchon est au pouvoir, ce qui confirme qu’il espère changer le monde de façon autoritaire (en participant au pouvoir occupé par un mouvement politique au sein duquel il n’a pas milité activement).

[18] Étienne Chouard, Notre cause commune, op. cit., p. 107.

[19] Parmi les critiques des GJ de gauche, on retiendra celles de la revue Temps critiques qui souligne les « faiblesses politiques de cette revendication » : ses rédacteurs craignent en particulier qu’il « remette à des lendemains hypothétiques et individualistes des choses que nous pourrions arracher dès aujourd’hui et collectivement (hausse des salaires, meilleure prise en charge des personnes en EHPAD, etc.) si la lutte se fixait des objectifs plus concrets » (Temps critiques, L’événement Gilets jaunes, La Bauche, Editions A plus d’un titre, 2019, p. 102). Cette solution magique : « Pour certains militants du RIC, celui-ci serait même tellement efficace qu’il éliminerait toutes les sources de conflit. Il suffirait en effet de voter, évitant ainsi tous els troubles que représentent les manifestations et les grèves. C’est un fantasme bien connu en politique : certains protagonistes pensent que l’on peut couper l’histoire en deux, ils veulent changer les choses pour ne plus avoir à les changer. Le RIC est ici le fétiche de ce fantasme » (ibid., p. 122). Ils citent un flyer que l’on a fait circuler dans le Doubs et le Jura : « Avec le RIC, manifestations et grèves n’auront plus lieu d’être, un vote décidera » (ibid., p. 123).

[20] Pour Chouard la défense du RIC au sein du mouvement des GJ devait être la première revendication, mais il proposait d’y adjoindre une mesure secondaire qui aurait bénéficié aux plus pauvres, à savoir la hausse du Smic et des pensions. Il fait cette proposition notamment lors d’une conférence donnée en décembre 2018 sur le RIC à destination des GJ (« Le référendum des Gilets jaunes », 8 décembre 2018, Demos Kratos, en ligne : www.youtube.com/watch?v=rPKZKvQzhik). D’autres défenseurs du RIC au sein des GJ défendaient pour leur part d’en faire la revendication unique du mouvement. « Avec le RIC en tête d’affiche ce serait une coupure entre révolution démocratique et révolution sociale à laquelle on assisterait. Le RIC ne peut en effet rien contre le patronat, les licenciements, la fixation des revenus autres que le salaire minimum. C’est cette lutte-là qui serait délaissée au profit de la lutte contre la corruption, la prévarication, le revenu trop élevé des députés, alors que la bande à Macron a été entièrement débauchée du privé et comme la plupart étaient déjà des "premiers de cordée" dans leurs domaines respectifs, ils gagnent plutôt moins en tant que députés et ministres ! » (Temps critiques, L’événement Gilets jaunes, op. cit., p. 123).

[21] On a ainsi construit à partir des années 1970 la notion de « maltraitance » (Laurent Mucchielli, L’invention de la violence. Des peurs, des chiffres, des faits, Fayard, 2011, p. 186-187).

[22] Ibid., p. 188. Il ne faut pas chercher plus loin l’origine des rumeurs concernant les « notables » commettant des crimes sexuels (dans le cadre d’un réseau pédo-criminel par exemple)…

[23] Les riches peuvent employer des domestiques illégalement, au noir, ou plus souvent au « gris », en déclarant une partie seulement des heures travaillées, pour bénéficier des déductions fiscales (Alizée Delpierre, Servir les riches. Les domestiques chez les grandes fortunes, La Découverte, 2022, p. 131). Il n’est pas possible de les contrôler, car cela se passe dans un espace privé… Et de toute façon, on signe rarement un contrat de travail en bonne et due forme avec ses domestiques.

[24] Il est certain que les positions de Chouard permettent de discuter du pouvoir (politique), thème qui peut passer au second plan à gauche (surtout dans une certaine gauche autoritaire) et de réfléchir à une solution au recul actuel de la démocratie représentative. Les « ateliers constituants », qui se sont multipliés aux quatre coins de la France (notamment sur des ronds-points de Gilets jaunes), ont ainsi permis de faire un travail d’éducation populaire sur les institutions politiques et le fondement du pouvoir. Il n’est pas impossible également que cela ait conduit nombre de participants à s’intéresser à la pensée anarchiste (que Chouard contribue à promouvoir dans ses conférences, en invitant son public à lire des anarchistes comme Daniel Guérin ou Pierre Kropotkine), certainement la pensée la plus éclairante sur ce sujet (la démocratie directe faisant partie des principes de base de l’anarchisme). Pour fonder une société plus juste et démocratique, il faudra peut-être écouter d’autres auteurs (comme Bernard Friot), et se mettre à l’école du mouvement ouvrier, qui a véritablement obtenu des avancées décisives en matière de justice sociale.

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